Après des mois et des mois de recherche, Business Angel France a trouvé un banquier prêt à se mouiller. Et, ceci expliquant sûrement cela, c’est un banquier entrepreneur.
Voici donc l’interview de Loïc Brasero, directeur de succursale à la Bred et patron dans le domaine du rugby.
1. La grande majorité des créateurs d’entreprise se plaignent de leur rapports avec leur banque (quand elles en trouvent une !). Pourquoi ?
Les entrepreneurs ont besoin des banques et les banques ont besoin des entrepreneurs.
Le rôle et le modèle économique des banques sont très mal compris de la plupart des startups. En effet, une banque réalise de très faibles marges sur les financements qu’elle accorde, moins de 1% de la somme prêtée. Avec cette marge elle doit payer ses frais de structure et les éventuels impayés. Le niveau de risque pris est donc forcément quasi nul.
La banque prête de l’argent que l’on doit lui rendre, elle ne partage pas un risque avec un entrepreneur. Pour limiter ce risque, les banquiers excluent, de fait, beaucoup de candidats à la création d’entreprise. De plus, la banque finance des actifs tangibles qui doivent pouvoir être cédés en cas de difficultés.
Le niveau de garantie offert par l’emprunteur, contrairement à une idée très répandue, n’intervient que très marginalement dans la décision.
Ces critères et leur utilisation sont souvent très déceptifs pour de jeunes entrepreneurs inexpérimentés qui ont beaucoup investi de temps et d’enthousiasme dans un business plan qui ne sera que peu pris en compte.
2. Dans le cas d’une création d’entreprise, comment choisir sa première banque ?
Tout d’abord, la banque compte plus que le banquier, c’est avec elle que vous contractez, pas avec lui. Le conseiller change d’agence tous les trois ans en moyenne ; on peut le comprendre ou le regretter, mais c’est un fait, au créateur d’en tenir compte.
Ensuite, comme pour tous les fournisseurs, il faut cibler des professionnels de la création d’entreprise. Si les besoins de financements sont importants ou récurrents, il faudra choisir une agence ou plusieurs conseillers professionnels travaillent, c’est un gage de professionnalisme. En effet, certaines structures ne gèrent que quelques dossiers par an quand d’autres en voient des centaines.
Enfin, il faut vérifier qui peut prendre la décision d’accorder le prêt et bien s’assurer de la capacité de dire oui localement.
La tarification n’est pas un élément de choix, les prix sont toujours équivalents d’un réseau à l’autre.
3. Les banques accordent très peu de prêts aux créateurs d’entreprise. Pourquoi ?
Un bon dossier est porté par un créateur ayant cinq ans d’expérience dans son secteur. Il couvrira la totalité des besoins intangibles (stocks, frais divers, perte d’exploitation de démarrage, communication…) et 20% des besoins tangibles (fond de commerce, immobilisations corporelles…).
On voit immédiatement que beaucoup de projets présentés ne correspondent pas à ces critères. On peut bonifier son dossier en s’associant avec des partenaires qui combleront ces manques, mais c’est souvent contradictoire avec la volonté du créateur de conserver le contrôle de son entreprise.
Attention à ne pas négliger la compétence du banquier, il est frileux par nature, mais il ne faut jamais oublier que l’entrepreneur porte l’immense majorité du risque et qu’un échec peut avoir des conséquences dramatiques pour lui.
4. Comment négocier avec sa banque ?
Comme avec tous fournisseurs, intelligemment. Il faut beaucoup communiquer, comprendre les intérêts et les contraintes de la banque et construire ensemble une solution optimum pour les deux parties.
J’insiste, mais le prix est rarement déterminant, au moins en phase de création.
5. Tu te présentes comme banquier entrepreneur. C’est possible de faire les deux ?
Les modes de réflexion sont parfois antinomiques et peuvent rendre schizophrène.
Les expériences accumulées dans mes deux fonctions favorisent les résultats de chaque côté. C’est positif pour mon employeur (la Bred) et mes clients apprécient beaucoup d’avoir face à eux un entrepreneur.
Au quotidien, cela demande de l’organisation et nécessite une grande capacité à déléguer. J’ai la chance d’être bien entouré et de travailler pour une banque qui me laisse une grande autonomie de fonctionnement.
6. Allez, on est entre nous, Loïc, un conseil exclusif pour les lecteurs de Business Angel France ?
N’écoutez pas les conseils, surtout les miens ! En effet, un entrepreneur est un individu qui prend des décisions que les autres n’auraient pas prises.
Merci, Loïc
Et comme c’est instructif de savoir comment fonctionne une banque. En effet, à défaut d’aimer les banquiers, vous allez mieux les comprendre et ça vous évitera de perdre du temps et de vous énerver inutilement.
En complément de cette excellente interview, je souhaiterais partager l’article de Dynamique Entrepreneuriale du mois d’Avril « Que peut-on négocier avec son banquier ? » dans lequel mon associé Stéphane Kirsch donne les clés d’une bonne négociation avec la banque : sujet d’actualité !
https://www.patrick-hannedouche.fr/wp-content/uploads/2017/02/04-12-dynamique-entrepreneuriale.pdf
Jean-Philippe Deltour
CREDITRELAX
Je dirige une jeune entreprise innovante qui prépare l'arrivée sur le marché d'une nouvelle génération d'instruments de musique. Autant vous dire que pour trouver une banque qui accepte de financer nos premières versions, ce n'était pas évident. C'est notre club d'entrepreneur (Réseau Entreprendre 93) qui nous a aiguillé vers Loïc qui connait bien les problématique des pme innovantes qui a nous a fait confiance. Nous étions alors face à la fois à un banquier et à un entrepreneur, on s'est bien compris.